Autriche 1918 – 1945 |
À la mi-avril 1933, le SDAPDÖ organisa un congrès extraordinaire sous le titre d’une conférence du Parti au niveau du Reich[1]. Le groupe dit de gauche demanda des mesures immédiates contre le gouvernement, alors que la direction du Parti autour d’Otto Bauer, Karl Renner et Robert Danneberg s’y opposait. Finalement, le groupe autour de Bauer l’emporta et le groupe dit de droite du Parti (donc la direction du Parti en Basse-Autriche) fut chargée de négocier pour surmonter la crise parlementaire. Le chancelier Dollfuß, informé de la situation, nomma alors Carl Karwinsky, officiellement sans-parti, pour représenter le gouvernement. De 1933 à 1934, Karwinsky fut secrétaire d’État aux affaires de sécurité.
Le Schutzbund, le moyen de pouvoir le plus puissant de la social-démocratie, était déjà interdit depuis fin mars 1933. Néanmoins, d’innombrables négociations eurent lieu, qui n’atteignirent jamais un caractère officiel. Les négociateurs social-démocrates tentèrent d’entrer en contact avec tous les fonctionnaires chrétiens-sociaux qu’ils considéraient comme des "démocrates". En règle générale, Dollfuß ne participa pas aux négociations. Les évènements autour du congrès du SDAPDÖ qui débuta le 14 octobre 1933 au foyer des travailleurs de Favoriten à Vienne constituèrent toutefois une exception.
Le congrès du Parti risquait d’être interdit ou du moins surveillé par la police, et un négociateur du SDAPDÖ s’efforça d’obtenir du gouvernement des concessions pour sa tenue. Le résultat de la discussion fut finalement le suivant. Le congrès ne serait pas surveillé et aucun représentant du gouvernement ne serait envoyé; il suffirait d’envoyer chaque soir au secrétaire d’État une copie des procès-verbaux des débats; tous les orateurs du congrès – aussi bien les conférenciers que les intervenants des débats – se verraient garantir une totale liberté de parole, aucune poursuite policière n’aurait lieu.
Bauer salua cette solution, en particulier parce qu’il lui semblait précieux que le chancelier et le secrétaire d’État obtiennent, grâce aux procès-verbaux des débats du congrès, une image sans fard de l’émoi des grandes masses. Cependant, les masses n’avaient pas de leur côté la possibilité de s’informer sur les discussions du congrès, qui se déroulait en grande partie à huis clos. Il n’a pas été possible de publier un compte-rendu imprimé du congrès, comme cela avait été le cas lors de tous les congrès précédents. Le seul moyen de diffusion du contenu était le Arbeiter-Zeitung, soumis à la censure.
Malgré ces circonstances difficiles, un grand nombre de représentants de haut niveau de la social-démocratie internationale participèrent au congrès, dont Léon Blum de France, Herbert Smith d’Angleterre et Émile Vandervelde de Belgique.
Le groupe dite de gauche du Parti s’était organisé et avait adopté sa propre résolution qu’il voulait faire voter au congrès. La résolution contenait un règlement de comptes avec la politique rétrograde menée jusqu’à présent par la direction du Parti et appelait à des mesures offensives pour rétablir des conditions démocratiques en Autriche. Après de longues discussions entre les représentants de l’aile gauche autour d’Ernst Fischer et la direction du Parti, on renonça à un vote contradictoire et on se mit d’accord sur une proposition de compromis élaborée en commun, qui fut adoptée à l’unanimité.
Ce compromis était en réalité une défaite de la gauche du Parti, et la direction du Parti a donc poursuivi sa politique de négociation par le biais d’intermédiaires. Suite au congrès, Renner fut en outre chargé par le comité directeur du Parti d’élaborer un projet de constitution sur une base corporatiste. Ce projet prévoyait un transfert de pouvoir du Parlement vers le gouvernement et vers un nouveau Conseil d’État à créer. Le président fédéral se voyait également attribuer de nouvelles compétences. Mais Dollfuß ne voulait même plus négocier à ce sujet par le biais d’émissaires.
[1]. Cette présentation est basée sur le texte :
Elisabeth Loinig, Stefan Eminger, Andreas Weigl (Herausgeber), Wien und Niederösterreich – eine untrennbare Beziehung?; St. Pölten, Verlag NÖ Institut für Landeskunde, 2017.